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01/06/05
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SUJET AGE ET ANTIDIABETIQUES - Recommandations ANSM / EMEA
Prévenir la iatrogénèse médicamenteuse chez le sujet âgéLa iatrogénèse médicamenteuse constitue un problème de santé publique tout particulièrement d'actualité chez les personnes âgées.La loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique fixe comme objectif de parvenir d'ici 5 ans à la réduction de la fréquence des prescriptions inadaptées chez les personnes âgées, et à la réduction de la fréquence des évènements iatrogènes d'origine médicamenteuse entraînant une hospitalisation.Les sujets âgés peuvent être définis comme étant les personnes de plus de 75 ans, ou de plus de 65 ans et polypathologiques. Ils sont particulièrement exposés au risque de iatrogénèse médicamenteuse : en 2001, les plus de 65 ans représentaient 16% de la population et consommaient 39% des médicaments prescrits en ville (1).Les études ont montré que les effets indésirables médicamenteux sont deux fois plus fréquents en moyenne après 65 ans (2) et que 10 à 20% de ces effets indésirables conduisent à une hospitalisation (3). Ces chiffres sont vraisemblablement sous-estimés par la sous-notification et la sous-identification de nombreux événements iatrogènes. De plus, 30 à 60% des effets indésirables des médicaments sont prévisibles et évitables (4) : on parle de iatrogénèse médicamenteuse évitable. Ils sont le plus souvent la conséquence d'une erreur thérapeutique (mauvaise indication, non-respect des contre-indications, posologie excessive ou traitement trop prolongé), d'une mauvaise observance du traitement ou d'une automédication inappropriée (5) chez des patients polymédiqués, âgés et "fragiles".Une cause médicamenteuse doit être systématiquement évoquée devant toute altération de l'état de santé d'une personne âgée dont l'explication n'est pas d'emblée évidente. Les signes sont souvent peu spécifiques et peuvent se résumer à une altération de l'état général, des chutes, une perte d'autonomie ou une clinophilie.Après une revue des principaux facteurs de risque à prendre en compte dans cette population, les règles générales s'appliquant à toute prescription et délivrance de médicament chez le sujet âgé sont rappelées. A la suite, des recommandations spécifiques sont définies pour les classes médicamenteuses considérées comme les plus à risque sur la base des données disponibles et en tenant compte de l'avis du groupe d'experts consulté.1. Principaux facteurs de risque à prendre en compteLes facteurs de risque sont liés à l'âge du patient, au contexte socio-environnemental, à une mauvaise utilisation des médicaments ou encore aux médicaments eux-mêmes (6).1.1. Facteurs de risque liés à l'âgeLors du vieillissement, l'organisme subit des modifications notables. Ces facteurs peuvent avoir des conséquences d'une part sur l'action d'un certain nombre de médicaments et d'autre part, sur leur administration.* Conséquences du vieillissement sur l'action des médicamentsEn considérant d'une part les paramètres pharmacocinétiques des médicaments, le vieillissement peut avoir des conséquences sur leur action dont il est nécessaire de tenir compte :- la réduction de la fonction rénale est la plus importante : la posologie des médicaments à élimination rénale doit être adaptée au débit de filtration glomérulaire ;- l'hypoprotidémie et l'hémoconcentration chez les patients dénutris : il existe un risque potentiel de surdosage des médicaments fortement fixés aux protéines plasmatiques ;- la perte ostéo-musculaire et le gain adipeux : les distributions masse grasse/ masse maigre et donc les volumes de distributions sont modifiés. Les médicaments lipophiles ont tendance à être stockés puis relargués ;- la modification de la perméabilité de la barrière hémato-encéphalique peut entraîner une plus grande sensibilité aux médicaments agissant au niveau du système nerveux central (notamment effet sédatif).En revanche, il ne semble pas à ce jour y avoir de traduction clinique patente d'une moindre métabolisation hépatique des médicaments qui serait due à l'âge.En considérant d'autre part la pharmacodynamie des médicaments, le vieillissement peut aussi avoir des conséquences sur leur action dont il est nécessaire de tenir compte :- le vieillissement du coeur, en particulier la perte du contingent de cellules nodales, peut entraîner une plus grande sensibilité à certains médicaments (troubles voire blocs conductifs) ;- la fragilité osseuse nécessite de surveiller particulièrement le risque d'hypotension orthostatique lié à certains médicaments (chutes, fractures).Ces modifications physiologiques co-existent le plus souvent avec de multiples pathologies et sont aggravées par des épisodes aigus intercurrents (déshydratation, décompensation cardiaque, maladies infectieuses.).Ces épisodes aigus intercurrents (et leurs conséquences comme une insuffisance rénale) expliquent que même des médicaments pris depuis très longtemps peuvent être à l'origine d'un accident médicamenteux.* Conséquences du vieillissement sur l'administration des médicamentsDe nombreux facteurs sont susceptibles d'interférer avec l'administration des médicaments :- la réduction des capacités physiques,- les difficultés de communication,- les troubles de la déglutition (risque de stagnation prolongée des médicaments dans la bouche et l'oesophage),- la baisse de l'acuité visuelle ou de l'audition.Les pathologies de la mémoire et les troubles de la compréhension doivent également être pris en compte.Dans certains cas, il n'existe plus de possibilité de compensation aux phénomènes de perte de mémoire et de mauvaise observance, la seule solution devient alors la prise contrôlée par un tiers.Un comportement suicidaire ou toxicomaniaque peut également être à l'origine d'effets indésirables médicamenteux.1.2 Facteurs de risques sociaux et environnementauxCes facteurs peuvent influencer la prise en charge médicale et le suivi thérapeutique, en particulier :- l'isolement social ou géographique,- la dépendance,- le changement du mode de vie (déménagement, institutionnalisation),- les conditions climatiques extrêmes (7).1.3 Facteurs de risque liés à une mauvaise utilisation des médicamentsPlusieurs situations peuvent entraîner une mauvaise utilisation des médicaments :- une prescription inadaptée : objectifs thérapeutiques inadaptés au malade, prescriptions non pertinentes au regard de l'indication/du choix de la classe médicamenteuse/de la dose et/ou de la durée, interactions médicamenteuses, association de médicaments ayant des effets indésirables communs et majorant leurtoxicité, surveillance inadaptée, réévaluation du traitement insuffisante, médicaments inutiles ;- une information insuffisante du patient et de son entourage ;- une automédication inappropriée ;- une mauvaise observance du traitement.1.4 Facteurs de risque liés aux médicamentsLors de l'octroi d'une autorisation de mise sur le marché (AMM), l'évaluation du profil de sécurité d'emploi d'un nouveau médicament chez les personnes âgées ne concerne le plus souvent que des effectifs relativement réduits.D'autre part, les effets indésirables sont favorisés par la polymédication en réponse à une polypathologie fréquente. Une étude a montré que les effets indésirables sont plus fréquents lorsque la consommation médicamenteuse est plus importante (8).C'est la prise en compte de l'ensemble de ces facteurs de risque au moment de l'instauration, de la surveillance ou de la poursuite d'un traitement médicamenteux, qui permettra de diminuer la survenue d'événements indésirables.2. Recommandations généralesChez les personnes âgées, il est indispensable de prendre en compte avant toute prescription les paramètres pharmacocinétiques et pharmacodynamiques des médicaments ainsi que les données de pharmacovigilance.Quel que soit le profil de risque potentiel ou avéré des classes thérapeutiques utilisées, un bilan clinique et biologique minimal doit être réalisé régulièrement chez toute personne âgée polymédiquée.Il comprend notamment :* au plan clinique, la surveillance :- du poids,- de la pression artérielle (recherche d'une hypotension orthostatique),- de la fréquence cardiaque ;* au plan biologique, la surveillance :- du ionogramme sanguin (notamment recherche d'une dyskaliémie),- de la créatininémie (une créatininémie normale n'exclut pas une éventuelle insuffisance rénale),- de la clairance de la créatinine (ml/min) évaluée par la formule de Cockcroft & Gault :Clairance de la créatinine = [(140 - âge en années) x poids (en kg)] / [0,81 x créatininémie (µmol/l)]Femme = clairance de la créatinine x 0,85Les patients ou leur entourage doivent être incités à informer le médecin de tout événement ou pathologie intercurrente pouvant remettre en cause un équilibre très souvent fragile, et augmenter le risque de détérioration d'une fonction rénale déjà précaire.2.1 Lors de la décision thérapeutique : s'informer sur le patient- Considérer la maladie à prendre en charge, les pathologies associées et leur hiérarchisation en fonction de la situation présente.- Tenir compte de l'ensemble des facteurs de risque liés au patient pouvant favoriser la survenue d'un effet indésirable, en particulier en mesurant systématiquement la fonction rénale.- Définir des objectifs thérapeutiques à court et moyen terme en prenant en compte les risques majeurs pour le patient et ses attentes ; ceci conduit à une hiérarchisation des traitements qu'il faudra respecter.- Dresser la liste complète des médicaments pris par le patient, qu'ils soient sur prescription (et souvent de plusieurs prescripteurs) ou en automédication (armoire à pharmacie ou achat en officine sans ordonnance).- Avant de prescrire, vérifier que les symptômes présentés par le patient ne sont pas des effets indésirables d'un ou d'une association de médicaments antérieurement reçus.- Evaluer les capacités du patient à prendre seul ses médicaments et à s'impliquer dans la surveillance de son traitement ; sinon, s'assurer que son entourage pourra le faire.2.2 Lors de la rédaction de l'ordonnance : maîtriser le traitement- S'assurer que le traitement est réellement indiqué et indispensable, et qu'il est organisé en fonction de la hiérarchisation antérieurement définie.- Limiter la polymédication et éviter tous les médicaments qui ne sont pas justifiés. A chaque nouvelle intervention, s'interpeller pour savoir quel médicament n'est plus indispensable et pourrait être supprimé.- Privilégier des schémas thérapeutiques simples.- Adapter (systématiquement à la fonction rénale) la posologie des médicaments en tenant compte des paramètres pharmacocinétiques des médicaments et de l'ensemble des modifications physiologiques et/ou pathologiques du patient.- Veiller à ne pas induire d'associations à l'origine d'interactions médicamenteuses ayant des conséquences cliniques.- Eviter de prescrire des médicaments peu efficaces, de même que des médicaments à une posologie / un rythme / ou une durée de traitement non adaptés aux personnes âgées.- S'assurer que la posologie proposée sera efficace (en cas de sous-dosage, risque d'inefficacité et d'inutilité chez le sujet âgé).- Prévoir la durée du traitement, les modalités de surveillance et les modalités d'arrêt.- Vérifier que les conditions d'administration sont adaptées au malade et que la prescription est précise, claire et compréhensible.- Mettre en garde le patient contre l'auto-prescription de médicaments, et l'inciter à toujours prendre l'avis de son médecin ou de son pharmacien.- Encourager l'observance du patient en le motivant, en lui expliquant son traitement, les objectifs thérapeutiques, les modalités de suivi et d'arrêt éventuel ; donner les explications à l'entourage du patient.- Conseiller au patient et à son entourage d'avoir l'ensemble du traitement ou toutes les ordonnances, en cas d'hospitalisation d'urgence.2.3. Lors du suivi thérapeutique : évaluer l'efficacité et la tolérance- Ne pas oublier que tout symptôme clinique peut être l'expression d'un effet indésirable.- Réévaluer régulièrement l'intérêt de chacun des médicaments en termes de bénéfice-risque individuel.- Surveiller et adapter le traitement, notamment lors de nouvelles pathologies aiguës intercurrentes.- Supprimer tout médicament qui apparaît soit inadapté (diagnostic erroné, mauvaise observance), soit à l'origine d'effet indésirable, soit non indispensable, en tenant compte de la pathologie traitée, de la hiérarchisation des pathologies, de l'état pathologique, et du risque de syndrome de sevrage.- Toujours s'interroger sur la nécessité de poursuivre un traitement et éviter " l'accumulation des médicaments au fil des années ".- L'arrêt de certains médicaments doit être progressif pour éviter les phénomènes de sevrage ou de rebond.2.4 Lors de la délivrance par le pharmacien- Consulter attentivement l'historique médicamenteux du patient ; s'il n'est pas disponible, interroger le patient ou son entourage.- Eviter de changer de marque de médicament générique lors du renouvellement d'un traitement.- S'assurer que le patient peut prendre correctement ses médicaments (forme galénique, modalités d'administration).- Expliquer l'ordonnance au patient et à son entourage : notamment pathologie(s) prise(s) en charge, modalités de traitement (schéma de prise, durée) pour chacun des médicaments.- Inscrire lisiblement la posologie sur les conditionnements et si nécessaire rédiger un plan de prise.- Signaler au patient tout changement de présentation des médicaments qu'il prend régulièrement, en particulier tout changement de conditionnement (volume, couleur.), de forme galénique (forme, taille, couleur.).- Vérifier aussi l'observance du traitement en posant par exemple les questions suivantes : " Vous arrive-t-il d'oublier de prendre vos médicaments ? " ou " Lorsque vous vous sentez mieux ou plus mal, arrêtez vous ou modifiez vous la prise de vos médicaments ? ".- Etre très prudent lors de la délivrance de certains médicaments achetés sans ordonnance.Tout effet indésirable grave ou inattendu doit être signalé au Centre Régional de Pharmacovigilance (CRPV) dont vous dépendez (coordonnées disponibles sur le site Internet de l'Afssaps ou dans les premières pages du dictionnaire Vidal).Site Internet de l'Afssaps : www.afssaps.sante.fr3. Recommandations par classe thérapeutiqueD'après les principales études recensées, les médicaments fréquemment en cause dans les effets indésirables chez le sujet âgé sont les médicaments à visée cardio-vasculaire, les médicaments du système nerveux central, les antalgiques et les AINS (8 ; 9).Ces éléments sont en partie confirmés par les notifications adressées aux centres régionaux de pharmacovigilance en 2003 : la fluindione, le furosémide, la spironolactone, la digoxine et l'amiodarone font partie des principes actifs les plus fréquemment mis en cause dans les notifications d'effets indésirables graves chez les patients de plus de 70 ans.Les recommandations visent ces différentes substances et classes thérapeutiques qui reflètent les pathologies majeures qu'elles traitent chez les sujets âgés. Elles visent également les classes médicamenteuses pour lesquelles le risque d'effet indésirable augmente lorsqu'il y a accumulation des facteurs de risque.Ainsi, les classes thérapeutiques suivantes font l'objet de cette mise au point :Annexe 1 : médicaments du système cardio-vasculaireAnnexe 2 : anticoagulantsAnnexe 3 : psychotropesAnnexe 4 : anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) Annexe 5 : antidiabétiques Annexe 6 : anti-infectieux (antibiotiques) Annexe 7 : statines Annexe 8 : médicaments utilisés dans la démence Les informations présentées pour chacune de ces classes ne sont pas exhaustives. Elles visent à attirer l'attention du prescripteur sur les points importants en termes d'instauration, d'adaptation, de suivi ou d'arrêt de traitement dans la population particulière que constituent les sujets âgés.Ces données doivent être complétées par la consultation des monographies des spécialités concernées (RCPs), des mises au point ou recommandations disponibles sur le site Internet de l'Afssaps pour certaines spécialités, et du thésaurus des interactions médicamenteuses (10).Un thésaurus " médicaments et sujets âgés " couvrant l'ensemble des classes thérapeutiques sera élaboré dans les prochains mois pour guider les professionnels de santé, et en particulier pour permettre un choix éclairé dans la prescription.ANNEXE 5 : AntidiabétiquesClasses thérapeutiques : Insulines (1), Biguanides (2), Sulfamides (3), Inhibiteurs de l'alfa-glucosidase (4), Glitazones (5).De manière généraleLe traitement doit être adapté à l'objectif thérapeutique déterminé en fonction desco-morbidités, de l'espérance de vie, du mode de vie (isolement) et des possibilités de surveillance.Les risques principaux sont à la fois l'hypoglycémie (traitement excessif) et la décompensation du diabète (acidocétose, hyperosmolarité par traitement insuffisant).La surveillance du diabète (glycémies capillaires) doit être renforcée à l'occasion de toute pathologie intercurrente ou en cas d'introduction d'un médicament interférant sur l'équilibre glycémique.L'association des bêtabloquants (collyres compris) avec tous les médicaments hypoglycémiants peut masquer les signes annonciateurs d'hypoglycémie.1) Insulines- Une altération progressive de la fonction rénale peut provoquer une diminution régulière des besoins en insuline.2) Biguanide (metformine)- Attention à toute altération de la fonction rénale puisque la metformine est éliminée par cette voie. Certaines interactions peuvent altérer la fonction rénale comme la co-prescription d'AINS, de diurétiques, d'IEC ou d'ARA II et nécessitent des précautions particulières en cas d'insuffisance rénale modérée. La clairance de la créatinine doit être contrôlée 2 à 4 fois par an.- La metformine est contre-indiquée dans les cas suivants en raison du risque d'acidose lactique :. insuffisance rénale ou altération de la fonction rénale (le risque est particulièrement important si la clairance de la créatinine est < ou égale à 40 ml/min) ;. affection aiguë susceptible d'altérer la fonction rénale (déshydratation, fièvre) ;- maladies aiguës ou chroniques pouvant entraîner une hypoxie tissulaire (insuffisance cardiaque ou respiratoire, infarctus du myocarde récent).3) Sulfamides- Attention à la survenue d'épisodes d'hypoglycémie, auxquels les sujets âgés sont particulièrement sensibles.- Les sulfamides à très longue durée d'action (glipizide sous forme de comprimé à libération prolongée, carbutamide) sont contre-indiqués chez les patients de plus de 65 ans en raison de leur risque important d'hypoglycémie prolongée.- Ils sont contre-indiqués si la clairance de la créatinine est inférieure à 30 ml/min.4) Inhibiteurs de l'alfa-glucosidase (acarbose, miglitol)- Ils sont contre-indiqués en cas d'antécédents digestifs (hernies ou éventrations, antécédents sub-occlusifs) ou si la clairance de la créatinine est inférieure à 30 ml/min.5) Glitazones (pioglitazone, rosiglitazone)- Elles sont contre-indiquées en cas d'insuffisance cardiaque (stade III ou IV de la NYHA) ou d'antécédent d'insuffisance cardiaque, et d'insuffisance hépatique. Il faut être prudent en cas d'anémie.L'Afssaps a élaboré cette mise au point à partir des évaluations d'un groupe multidisciplinaire d'experts présidé par C. Caulin (Hôpital Lariboisière, Paris) et D. Vittecoq (Hôpital Paul Brousse, Villejuif) et composé de :P. Auriche (Afssaps), Ph. Bourrier (Centre Hospitalier, Le Mans), Ph. Camus (Centre hospitalier universitaire, Dijon), A. Castaigne (Hôpital Henri Mondor, Créteil), JP. Charmes (Centre Hospitalier Universitaire, Limoges), C. Deguines (Afssaps), G. Deray (Hôpital Pitié-Salpétrière, Paris), M. Detilleux (Hôpital Cochin, Paris), B. Diquet (Centre Hospitalier Universitaire, Angers), J. Doucet (Centre Hospitalier Universitaire, Rouen), C. Kreft-Jaïs (Afssaps), M. Labourdette (CRPV, Strasbourg), S. Lauraire (Afssaps), JP. Lépine (Hôpital Fernand Widal, Paris), L. Merle (CRPV, Limoges), F. Piette (Hôpital Charles Foix, Ivry sur Seine), O. Réveillaud (cabinet médical, Bièvres), B. Saint-Salvi (Afssaps), C. Théry (Centre Hospitalier Régional Universitaire, Lille), JH. Trouvin (Afssaps), JM. Vetel (Centre Hospitalier, Le Mans), P. Veyssier (Centre Hospitalier, Compiègne), P. Vexiau (Hôpital Saint-Louis, Paris) et M. Ziegler (Hôpital Léopold Bellan, Paris).Ont participé à la finalisation du document :B. Bannwarth (Hôpital Pellegrin, Bordeaux), A. Baumelou (Hôpital Pitié-Salpétrière, Paris), JF. Bergmann (Hôpital Lariboisière, Paris), C. Bruhat (CRPV, Angers), J. Caron (CRPV, Lille), A. Fernandez (Afssaps), C. Guy (CRPV, Saint Etienne), F. Haramburu (CRPV, Bordeaux), MJ. Jean-Pastor (CRPV, Marseille), L. Moachon (CRPV St Vincent de Paul, Paris), F. Pons (Afssaps), T. Trenque (CRPV, Reims), P. Wierre (Officine, Jeumont). La coordination scientifique et rédactionnelle a été réalisée par : A. Castot (Afssaps), L. Guicherd-Rogier (Afssaps) et A. Rouleau-Quenette (Afssaps).Ce document a été validé par le comité technique de pharmacovigilance du 8 mars 2005 présidé par le Pr J. Caron et la commission d'AMM du 24 mars 2005 présidée par le Pr D. Vittecoq.(1) Données CNAMTS, 2001(2) Bégaud B. et al. : Does age increase the risk of adverse drug reaction? Br. J. Clin. Pharmacol ; 2002; 54 : 548-552(3) Doucet J. et al : Les effets indésirables des médicaments chez le sujet âgé : épidémiologie et prévention. La presse médicale ; octobre 1999 ; 28 (32) : 1789-1793(4) Ankri J. : Le risque iatrogène médicamenteux chez le sujet âgé. Gérontologie et Société ; décembre 2002 ; 103 : 93-103(5) Queneau P. et coll. : Iatrogénie observée en milieu hospitalier. A propos de 109 cas corrigés à partir d'une enquête transversale de l'APNET. Bull. Acad. Natle Méd 1992 ; 176 (4) : 511-529(6) Doucet J. et al : Iatrogénie médicamenteuse : Thérapeutique de la personne âgée. Ed Maloine, 1998 : 47-64(7) Les mises au point " grand froid et médicaments " (décembre 2004) et " canicule et médicaments " (mai 2005) sont disponibles sur le site Internet de l'Afssaps(8) Perochon JM et al : Etude prospective des admissions de personnes âgées pour iatrogénie médicamenteuse en Poitou-Charentes. Etude URCAM, 1999 (9) Prescription médicamenteuse chez la personne âgée en Haute-Normandie : étude du risque iatrogénique. Etude URCAM, mars 1999 (10) Le thésaurus ou référentiel des interactions médicamenteuses (février 2005) est disponible sur le site Internet de l'Afssaps (11) Le point sur "les héparines de bas poids moléculaire" (avril 2002) est disponible sur le site Internet de l'Afssaps(12) Le point sur "les médicaments antivitamine K" (janvier 2004) est disponible sur le site Internet de l'Afssaps(13) La lettre aux prescripteurs "sur les troubles du comportement liés à l'utilisation des benzodiazépines et produits apparentés" (septembre 2001) est disponible sur le site Internet de l'Afssaps(14) Le point sur "sécurité d'emploi des coxibs" (mars 2005) est disponible sur le site Internet de l'Afssaps(15) La mise au point sur les effets musculaires des statines (avril 2002) et le point sur "CRESTOR (rosuvastatine) et toxicité musculaire" (juin 2004) sont disponibles sur le site Internet de l'Afssaps
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18/11/02
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MUCOVISCIDOSE : NUTRITION-METABOLISME - Recommandations Haute Autorité de Santé
Conférence de consensusPrise en charge du patient atteint de mucoviscidoseLundi 18 et mardi 19 novembre 2002Palais du Luxembourg - ParisObservance, nutrition, gastro-entérologie et métabolismeTexte des recommandations (version courte)PROMOTEURSociété Française de PédiatrieCOPROMOTEURSAssociation Française de Pédiatrie AmbulatoireAssociation Muco-KinéAssociation Pédagogique Nationale pour l'Enseignement de la ThérapeutiqueClub Pédiatrique de Pneumologie et AllergologieComité de Nutrition de la Société Française de PédiatrieGroupe Francophone d'Hépato-Gastro-Entérologie et Nutrition PédiatriquesSociété de Kinésithérapie de RéanimationSociété de Pneumologie de Langue FrançaiseSociété Française de MicrobiologieSociété Nationale Française de Gastro-entérologieSociété Nationale Française de Médecine InterneAVEC LE SOUTIEN DEVaincre la MucoviscidoseSOS MucoviscidoseCOMITÉ D'ORGANISATIONC. MARGUET, président : pédiatre, RouenG. BELLON : pédiatre, LyonJ. DE BLIC : pédiatre, ParisÉ. BINGEN : microbiologiste, ParisL. DAVID : pédiatre, LyonP. DOSQUET : méthodologie ANAES, ParisI. DURIEU : interniste, LyonB. HOUSSET : pneumologue, CréteilR. KLINK : pédiatre, LaonA. MUNCK : pédiatre, ParisC. PAINDAVOINE : méthodologie ANAES, ParisC. PERROT-MINNOT : kinésithérapeute, ReimsG. REYCHLER : kinésithérapeute, WoluweMD. TOUZÉ : méthodologie ANAES, ParisD. TURCK : pédiatre, LilleD. VITAL-DURAND : interniste, LyonB. WALLAERT : pneumologue, LilleTHEME 1 : PNEUMOLOGIE ET INFECTIOLOGIE (LUNDI 18 NOVEMBRE 2002)JURY 1B. HOUSSET, président : pneumologue, CréteilF. CAMBIER : pédiatre, AmiensP. FAINSILBER : généraliste, GaillonC. KARILA : pédiatre, MassyM. JORAS : journaliste, ParisJF. LEMELAND : microbiologiste, RouenH. LANIER : Vaincre la Mucoviscidose, ParisB. QUINET : pédiatre, ParisI. TILLIE-LEBLOND : pneumologue, LilleV. TOUZOT-DUBRULLE : kinésithérapeute, LilleEXPERTS 1P. ALTHAUS : kinésithérapeute, BottensG. BELLON : pédiatre, LyonF. BREMONT : pédiatre, ToulouseG. CHABANON : microbiologiste, ToulouseA. CLÉMENT : pédiatre, ParisV. DAVID : pédiatre, NantesP. DIOT : pneumologue, ToursS. DOMINIQUE : pneumologue, RouenD. HUBERT : pneumologue, ParisT. MOREAU : statisticien, VillejuifI. PIN : pédiatre, GrenobleP. PLESIAT : microbiologiste, BesançonA. SARDET : pédiatre, LensV. STORNI : pédiatre, RoscoffGROUPE BIBLIOGRAPHIQUE 1L. BASSINET : pneumologue, CréteilP. CHATAIN-DESMARQUETS : pédiatre, LyonM. LE BOURGEOIS : pédiatre, ParisL. LEMÉ : bactériologiste, RouenC. OPDEKAMP : kinésithérapeute, BruxellesI. SERMET-GAUDELUS : pédiatre, ParisC. THUMERELLE : pédiatre, LilleTHEME 2 : OBSERVANCE - NUTRITION - GASTRO-ENTEROLOGIE - METABOLISME (MARDI 19 NOVEMBRE 2002)JURY 2L. DAVID, président : pédiatre, LyonPY. BENHAMOU : endocrinologue, GrenobleL. BONNET : diététicienne, LyonA. FERRAND : sociologue, LilleX. FRANCISCO : généraliste, Nivolas-VermelleP. MEUNIER : pharmacien, ToursJ. MOREAU : gastro-entérologue, ToulouseA. NOIRET : pédiatre, LyonC. GRISON : SOS Mucoviscidose, ParisD. RIGAUD : nutritionniste, DijonC. LE GALL : pédiatre, LyonEXPERTS 2D. BELLI : gastro-entérologue, GenèveD. DEBRAY : pédiatre, Le Kremlin- BicêtreAG. LOGEAIS : Vaincre la Mucoviscidose, ParisC. MARTIN : endocrinologue diabétologue, Pierre-BéniteH. MOSNIER-PUDART : endocrinologue diabétologue, ParisO. MOUTERDE : pédiatre, FleurimontA. MUNCK : pédiatre, ParisM. ROUSSEY : pédiatre, RennesJ. SARLES : pédiatre, MarseilleP. TOUNIAN : pédiatre, ParisD. TURCK : pédiatre, LilleGROUPE BIBLIOGRAPHIQUE 2F. BADET : interniste, LyonP. BRETONES : endocrinologue pédiatre, LyonE. DUVEAU : pédiatre, AngersM. LAURENS : pédiatre, CaenN. ROULLET : pédiatre, ToursL. WEISS : pédiatre, StrasbourgL'ORGANISATION DE CETTE CONFERENCE A ETE RENDUE POSSIBLE GRACE A L'AIDE APPORTEE PAR : Chiron, GSK, Roche, Solvay Pharma, AstraZeneca, Whyett-Lederle, Braun Médical Division OPM, MSD Chibret Schering Plough, Aventis Pharma, Orphan, Nestlé, Vitalaire, Abbott, Baxter, Pari, Bastide Médical et par : Vaincre la Mucoviscidose, SOS MucoviscidoseAVANT-PROPOSCette conférence a été organisée et s'est déroulée conformément aux règles méthodologiques préconisées par l'Agence Nationale d'Accréditation et d'Évaluation en Santé (ANAES).Les conclusions et recommandations présentées dans ce document ont été rédigées par le jury de la conférence, en toute indépendance. Leur teneur n'engage en aucune manière la responsabilité de l'ANAES.INTRODUCTIONSi l'atteinte de l'arbre respiratoire tient une place centrale dans la mucoviscidose, sa prise en charge est indissociable des autres manifestations importantes de la maladie que sont la dénutrition, les manifestations digestives et hépatobiliaires et le diabète. Chacune de ces manifestations contribue en effet à la morbidité et à la mortalité de la maladie et peut aggraver l'atteinte pulmonaire. En préambule aux réponses aux questions posées, le jury souligne les difficultés auxquelles il a été confronté en raison d'une part du caractère non homogène des critères épidémiologiques et cliniques des études de la littérature, et d'autre part du très faible nombre d'études à fort niveau de preuve scientifique. Beaucoup des modalités de prise en charge n'ont pas été évaluées dans le cadre strict de la mucoviscidose et sont appliquées empiriquement sur la base des prises en charge de manifestations proches ou identiques dans d'autres contextes étiologiques.En raison de l'atteinte multiviscérale et des intrications entre les différentes composantes pathologiques, il est évident que la prise en charge de la mucoviscidose doit être confiée à une équipe pluridisciplinaire spécialisée avec une bonne coordination entre ses membres. Il est évident également qu'elle entraîne pour les patients des contraintes importantes qui retentissent sur leur qualité de vie et sur celle de leur famille et qui favorisent la non-observance thérapeutique.Bien qu'il n'y ait pas de lien démontré entre la mauvaise observance thérapeutique et l'évolutivité de la maladie, une mauvaise observance semble accélérer la maladie, soit de façon insidieuse, soit en augmentant la fréquence et la gravité des exacerbations aiguës. Il est donc nécessaire que le problème de l'observance soit abordé précocement et régulièrement avec les patients. Les protocoles doivent tenir compte de cet aspect important de la maladie en se limitant au minimum indispensable, et avec un souci de simplification des prises médicamenteuses ; ils doivent également prendre en compte les demandes individuelles pour préserver une certaine qualité de vie au risque parfois de s'éloigner du schéma idéal. Une prise en charge psychologique doit également être systématiquement proposée.QUESTION 1Quelle est l'influence de l'état nutritionnel sur l'évolution de la mucoviscidose ?La dénutrition est d'une grande fréquence dans la mucoviscidose, tous stades évolutifs confondus :- au moment du diagnostic : jusqu'à 44 % des patients ont une dénutrition, d'autant plus faible que le diagnostic est établi plus tôt ;- au moment du dépistage néonatal : 5 à 25 % ;- chez le nourrisson : 8-12 % (retard statural), 11-13 % (retard pondéral) ; une prise en charge précoce pourrait la diminuer (grade (1) C) ;- dans l'enfance : 9-17 % de retard statural et 4-8 % de retard pondéral entre 1 et 10 ans ;- à l'adolescence : de 8-21 % (retard statural) à 9-13 % (retard pondéral) ;- chez l'adulte : de 8 à 38 % (elle varie suivant l'âge, la gravité et les critères de dénutrition).Mieux évaluer l'état nutritionnel permet une prévention de la dénutrition et de ses conséquences. Des études suggèrent qu'un déficit nutritionnel important se rattrape mal : cela plaide pour un traitement précoce de la dénutrition (grade B).(1) Une recommandation de grade A est fondée sur une preuve scientifique établie par des études de fort niveau de preuve. Une recommandation de grade B est fondée sur une présomption scientifique fournie par des études de niveau de preuve intermédiaire. Une recommandation de grade C est fondée sur des études de faible niveau de preuve. En l'absence de précisions, les recommandations reposent sur un accord professionnel exprimé par le jury. Voir : ANAES. Guide d'analyse de la littérature et gradation des recommandations. Janvier 2000.LES MÉCANISMES RESPONSABLES DE LA DÉNUTRITIONLa dénutrition résulte de la négativité durable de la balance nutritive en rapport avec une réduction des ingesta et une augmentation des pertes.I. FACTEURS DE RÉDUCTION DES INGESTA- Anorexie : fréquente, par vomissements, toux, encombrement, inflammation, médicaments, dépression.- Inconfort digestif : reflux gastro-oesophagien, retard à l'évacuation gastrique, douleurs, constipation.- Régimes restrictifs.II. FACTEURS D'AUGMENTATION DES PERTES1. L'augmentation des pertes d'interface- L'insuffisance pancréatique exocrine touche environ 85 % des malades. Elle peut induire la malabsorption de la moitié des protéines et des lipides ingérés, et un déficit en vitamines liposolubles (A, D, E, K), B12 et zinc.- L'insuffisance intestinale : secondaire à une résection intestinale.- Les pertes sudorales : elles concernent l'eau, le sodium et les protéines.2. L'augmentation de la dépense énergétiqueElle est liée surtout à la détérioration de la fonction respiratoire, par augmentation du travail musculaire respiratoire, et à l'inflammation (surinfection).RETENTISSEMENT DE LA DÉNUTRITIONLa dénutrition entraîne des altérations dans de nombreux domaines :- fonction respiratoire ;- masses et fonctions musculaires ;- fonction immunitaire ;- fonction motrice digestive ;- fonction de réparation ;- croissance staturo-pondérale, croissance pulmonaire, puberté ;- développement psychomoteur, psychique, intellectuel ;- masse osseuse (ostéoporose et ostéomalacie) ;- espérance de vie.Dans la mucoviscidose, il existe un véritable cercle vicieux entre causes et conséquences de la dénutrition. Plusieurs études montrent que la maladie est aggravée par la dénutrition (études de niveau de preuve 2 à 4).PEUT-ON DÉFINIR DES CRITÈRES DE DÉNUTRITION ?Il n'y a aucune étude comparant différents critères nutritionnels dans la mucoviscidose. Dans la littérature, les critères les plus utilisés sont le poids et la taille.I. LES CRITÈRES CLINIQUES1. Les critères anthropométriques- Le poids en référence à la taille et à l'âge est un critère majeur. Le déficit pondéral est le signe le plus précoce de dénutrition : il s'évalue en pourcentage par rapport au poids idéal ou par la mesure de l'indice de masse corporelle (IMC).- Le déficit statural.- Le périmètre crânien n'a d'intérêt que chez le très jeune enfant.La surveillance évolutive de ces paramètres (courbes d'évolution) est essentielle : un bon critère d'altération de l'état nutritionnel est la sortie des " couloirs " de poids, taille et IMC.2. La composition corporelleElle permet de préciser si le déficit pondéral porte avant tout sur la masse maigre ou sur la masse grasse. Il est important de l'évaluer de façon dynamique. Il existe plusieurs moyens de mesure : pli cutané tricipital, circonférence brachiale, circonférence musculaire brachiale, impédancemétrie, absorptiométrie biphotonique.3. Autres variablesÉtat de la peau et des phanères, retard pubertaire.II. LES CRITÈRES BIO LOGIQUES SONT CEUX UTILISÉS DANS D'AUTRES TYPES DE DÉNUTRITION1. Les protéinesDans l'ordre de sensibilité décroissante : retinol binding protein (RBP), préalbuminémie, albuminémie.2. Les micronutrimentsFer sérique, hémoglobine, zincémie, vitamines A, D, E et K, acides gras plasmatiques.III. Statut minéral osseux- Détermination du contenu alimentaire en calcium.- Dosage de 25-hydroxy-vitamine D plasmatique.- Mesure du contenu minéral osseux et de la densité minérale osseuse par absorptiométrie biphotonique.RECOMMANDATIONS* La prévention de la dénutrition est un enjeu majeur pour améliorer le pronostic de la mucoviscidose. L'état nutritionnel doit être évalué dès le dépistage puis à intervalles réguliers :- paramètres cliniques tous les mois chez le nourrisson avant 1 an, puis tous les 3 à 6 mois ;- balance énergétique et contenu alimentaire en calcium tous les 3 à 6 mois ;- paramètres biologiques une fois par an ;- absorptiométrie osseuse une fois par an en période pubertaire.QUESTION 2Quelle stratégie peut-on proposer pour maintenir un état nutritionnel optimal ?LA COUVERTURE DES BESOINS NUTRITIONNELS ÉLÉMENTAIRESElle concerne tous les patients ne présentant pas de signe de dénutrition ou d'autres facteurs susceptibles de majorer les besoins ou de limiter les ingesta, et ceci dès le dépistage néonatal.I. Le nourrissonLe nourrisson adapte le plus souvent spontanément ses ingesta à ses besoins. L'allaitement maternel ou les formules lactées classiques peuvent être recommandés pour les enfants ayant une croissance normale. La diversification alimentaire se fait au 5e-6e mois comme chez l'enfant normal et obéit aux mêmes principes.L'iléus méconial avec résection intestinale nécessite souvent une phase de nutrition parentérale exclusive relayée par une nutrition entérale à débit continu.II. L'alimentation quotidienneElle a pour objectif des apports énergétiques supérieurs aux apports journaliers recommandés (AJR) pour l'âge. Des apports de 100 à 110 % des AJR sont généralement suffisants pour maintenir un état nutritionnel normal. On recommande :- des aliments riches en calories glucido-lipidiques ;- d'orienter très tôt les habitudes alimentaires vers ces aliments.Le recours à une diététicienne doit être précoce et régulier.L'intérêt des compléments hyperénergétiques avant l'apparition des signes de dégradation nutritionnelle n'est pas démontré.III. La compensation de l'insuffisance pancréatique exocrineElle impose le recours aux extraits pancréatiques (EP). Chez le tout-petit, il est proposé d'ouvrir la gélule et de donner les microgranules dans une boisson acide.Doses recommandées par l'AMM en unité lipase (UL) :- nourrisson : 2 000 à 4 000 UL/120 ml de lait ;- enfant : 1 000 UL/kg par repas, 500 UL/kg par collation, sans dépasser 100 000 UL/j ;- adolescent et adulte : ne pas dépasser 250 000 UL/j (10 gélules à 25 000 UL/j).Ces doses doivent être adaptées au cas par cas. Le patient peut moduler la posologie en fonction de la richesse en graisses des repas. Les doses peuvent être augmentées en cas de diarrhée ou d'inconfort digestif persistant. Si les signes persistent, on peut essayer de renforcer l'action des EP en réduisant l'acidité gastrique par des anti-H2 (grade C).IV. Les complémentsPour répondre aux besoins accrus en sodium et en eau, notamment en été, il est recommandé de donner des suppléments : solution de réhydratation orale entre les biberons ou gélules de sel. Des compléments d'apports en vitamines liposolubles A, D et E sous forme de complexes polyvitaminiques solubles sont recommandés à une posologie double de celle usuelle (grade C). La vitamine K est prescrite au cours de la première année de vie à raison de 5 à 10 mg une fois par semaine, puis en cas d'antibiothérapie prolongée.Oligo-éléments : des supplémentations en fer, zinc, sélénium, magnésium sont nécessaires en cas de carence démontrée.LES SITUATIONS À RISQUE OU COMPORTANT UN DÉFICIT NUTRITIONNELI. Situations à risqueLorsque les paramètres nutritionnels se dégradent on réalise :- une consultation diététique pour apprécier les apports et essayer d'améliorer les ingesta ;- un bilan médical pour a) évaluer l'observance ; b) adapter les posologies des extraits pancréatiques et des micronutriments ; c) rechercher des cofacteurs organiques (état inflammatoire, surinfection bronchique, dysphagie, diabète, cirrhose, hypertension portale) ; d) rechercher une composante psychologique, responsable d'une anorexie. II. Assistance nutritiveSon bénéfice sur l'état nutritionnel et respiratoire n'est pas clairement démontré ; elle peut révéler une intolérance aux glucides et un reflux gastro-oesophagien.Les suppléments nutritionnels sont d'efficacité mal démontrée, coûteux et mal acceptés à long terme. Ils ont l'inconvénient de souvent remplacer les apports oraux habituels.L'efficacité de la nutrition entérale est d'autant meilleure qu'elle est débutée précocement. Les sondes naso-gastriques sont souvent mal tolérées et la gastrostomie psychologiquement mal acceptée.La nutrition parentérale est un mode d'assistance nutritive lourd et coûteux. Elle doit être mise en balance avec ses effets secondaires potentiels.RECOMMANDATIONS GÉNÉRALESLa prise en charge nutritionnelle dans la mucoviscidose repose trop souvent sur des bases empiriques et des études sont nécessaires pour l'optimiser. Elle se heurte fréquemment à un problème d'observance, problème complexe qui nécessite la coordination entre l'ensemble des intervenants, le patient et son entourage. L'observance doit être facilitée par l'accès à des préparations associant plusieurs principes actifs.QUESTION 3Quelle doit être la démarche diagnostique devant des douleurs abdominales chez le patient atteint de mucoviscidose ?En l'absence de pathologie sous-jacente, les douleurs abdominales, qu'elles soient aiguës ou chroniques, sont des motifs de consultation fréquents, à tout âge.La démarche diagnostique repose sur un interrogatoire et un examen clinique soigneux. On ne doit pas sous-estimer une pathologie abdominale qui pourrait passer au second plan, chez des patients pour lesquels la préoccupation médicale est d'abord d'ordre pulmonaire.L'interrogatoire tentera de préciser le caractère aigu ou récurrent et l'intensité de la douleur, orientant ainsi la démarche diagnostique (cf. ci-dessous).=> Examens à visée diagnostique en cas de douleurs abdominales.DOULEURS AIGUËS EN URGENCE Examen clinique completBilan biologiqueASPÉchographie abdominale+/- opacification digestive basseDOULEURS ABDOMINALES RECURRENTESÉPIGASTRIQUE Examen clinique completFOGD+/- pHmétrieBilan biologiqueAUTRESExamen clinique completASP*Bilan biologique et immunologiqueÉchographie abdominale+/- stéatorrhée+/- opacification digestive basse+/- scanner abdominal+/- FOGD** et coloscopie* : ASP : radiographie de l'abdomen sans préparation ; ** : FOGD : fibroscopie oeso-gastro-duodénaleDIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUELes différentes étiologies des douleurs abdominales et les examens nécessaires à leur diagnostic sont rassemblés dans les tableaux 2 et 3. Parmi ces étiologies, certaines sont spécifiques ou particulièrement fréquentes.I. Étiologies spécifiques- Le mucocèle appendiculaire correspond à l'obstruction de la lumière appendiculaire par du mucus. Il se traduit à l'échographie par un appendice élargi avec lumière obstruée. Il peut être asymptomatique et devra alors être surveillé par échographie annuelle. Lorsqu'il est symptomatique les signes sont proches de ceux de l'appendicite.- Le syndrome d'obstruction intestinale distale (SOID) est l'équivalent de l'iléus méconial : obstruction de siège iléo-cæcal par des matières impactées et du mucus. Il se traduit par des douleurs en fosse iliaque droite, une distension abdominale, et une obstruction intestinale le plus souvent partielle.- La colopathie fibrosante (exceptionnelle) a été décrite chez de jeunes enfants prenant des doses excessives d'EP.II. Étiologies fréquentes- Pancréatite (15 % des patients).- Reflux gastro-oesophagien (46 à 10 %).- SOID (9 % chez l'enfant, 15 % chez l'adulte).- Constipation.RECOMMANDATIONS GÉNÉRALESUne démarche rigoureuse s'appuyant sur l'interrogatoire et l'examen clinique doit être prioritaire afin de limiter les examens agressifs et irradiants chez ces patients très sollicités sur le plan des investigations et des traitements. Une sédation efficace doit être faite pour les examens lourds.=> Étiologies des douleurs abdominales.DOULEURS AIGUËS AppendiciteInvagination intestinale aiguë Mucocèle appendiculaireVolvulus sur bridePancréatite aiguëLithiases biliairesAutres : gastro-entérite, infection urinaire, pathologie tubo-ovarienneDOULEURS RÉCURRENTESReflux gastro-oesophagienPancréatite chroniqueTroubles fonctionnels, constipationSyndrome d'obstruction intestinale distaleColopathie fibrosanteMaladie coeliaqueIntolérance aux protéines du lait de vacheMaladie de CrohnCancer digestif=> Principales étiologies des douleurs abdominales au cours de la mucoviscidose et examens diagnostiques.ÉTIOLOGIES => EXAMEN DE 1RE INTENTION - EXAMEN DE RECOURS- Constipation, Syndrome d'obstruction intestinale distale, VolvulusExamen de 1ère intention : ASP* Examen de recours : Lavement à la gastrograffine- Appendicite, Invagination intestinale aiguë, Mucocèle, Lithiase (biliaire, rénale)Examen de 1ère intention : Échographie abdominale Examen de recours : Lavement à la gastrograffine- Pancréatite, Maladie coeliaque, Intolérance aux protéines du lait de vacheExamen de 1ère intention : Biologie Examen de recours : Biopsie jéjunale, Test thérapeutique- Reflux gastro-oesophagienExamen de recours : Test thérapeutique, pHmétrie, TOGD***- Oesophagite, Gastrite, UlcèreExamen de 1ère intention : FOGD**, ± biopsies- Maladie de Crohn Examen de 1ère intention : Coloscopie + oeso-gastro-duodénoscopie + biopsies- Infection urinaire Examen de 1ère intention : Bandelette urinaire Examen de recours : Cytobactériologie urinaire- Colopathie fibrosante Examen de 1ère intention : Lavement baryté* : ASP : Rx de l'abdomen sans préparation ** : FOGD : fibroscopie oeso-gastro-duodénale*** : TOGD : transit oeso-gastro-duodénalQUESTION 4Quelles sont les stratégies diagnostiques et thérapeutiques des troubles du métabolisme glucidique au cours de la mucoviscidose ?Le diabète de la mucoviscidose résulte d'une destruction non auto-immune des îlots de Langerhans, aboutissant à une insulinopénie, et à une carence en glucagon. Il est précédé d'une phase d'intolérance au glucose.Sa prévalence augmente avec l'âge et atteint 50 % à 30 ans, la tranche d'âge 15-30 ans étant particulièrement exposée.Il est toujours associé à une insuffisance pancréatique exocrine et influencé par le génotype.Sa présentation clinique est le plus souvent silencieuse. Plus rarement, on trouve : polyuropolydipsie, mauvaise prise pondérale, retard de croissance et/ou pubertaire, détérioration de la fonction respiratoire, exacerbation des infections respiratoires.Le diabète aggrave la morbi-mortalité de la mucoviscidose. L'allongement de l'espérance de vie et donc de la durée de l'hyperglycémie explique l'apparition de rétinopathie et de néphropathie diabétiques. L'insulinothérapie améliore les paramètres respiratoires et nutritionnels (grade 2).Compte tenu des données épidémiologiques, il est conseillé de rechercher une anomalie de la tolérance au glucose de façon systématique une fois par an à partir de l'âge de 15 ans en réalisant une hyperglycémie provoquée orale (HGPO) (patient à jeun depuis 8 heures, prise de 1,75 g de glucose/kg, maximum 75 g, glycémie à jeun et à 2 heures).Un dépistage plus précoce (entre 10 et 15 ans) doit être envisagé en cas de déficit pondéral ou de troubles respiratoires inexpliqués.CRITÈRES DIAGNOSTIQUESLes critères diagnostiques sont résumés ci-dessous.=> Critères diagnostiques.Diabète Glycémie à jeun (8 h de jeune) : >ou= 1,26 g/L (7 mmol/L) Glycémie " au hasard " et symptômes cliniques : >ou= 2 g/L (11,1 mmol/L) Glycémie 2 heures après charge (HGPO) : >ou= 2 g/L (11,1 mmol/L)Anomalies de la toléranceHyperglycémie modérée à jeunGlycémie à jeun (8 h de jeune) : >ou= 1,1 g/l (6,1 mmol/L)Glycémie 2 heures après charge (HGPO) : < 1,26 g/l (7mmol/L)Intolérance au glucoseGlycémie à jeun (8 h de jeune) : >ou= 1,4 g/L (7,8 mmol/L)Glycémie 2 heures après charge (HGPO) : < 2 g/L (11,1 mmol/L)Normal Glycémie à jeun (8 h de jeune) : < 1,1 g/L (6,1 mmol/L) Glycémie 2 heures après charge (HGPO) : < 1,4 g/L (7,8 mmol/L)TRAITEMENTLe traitement est résumé ci-dessous.=> Traitement du diabète au cours de la mucoviscidose.OBJECTIFS - MOYENS - STRATEGIE - SURVEILLANCEGlycémie préprandiale : 0,90-1,40 g/l (5-8 mmol/l)Moyen : Education thérapeutique Stratégie : Intolérance au glucose :- conseils nutritionnels- autosurveillanceSurveillance : Evaluation pluridisciplinaire annuelleGlycémie postprandiale : 0,90-1,80 g/l (5-10 mmol/l)Moyens : -> Autosurveillance glycémique Stratégie : Diabète patent :- symptomatique : insulinothérapie- transitoire (corticothérapie, infections) : insulinothérapie- asymptomatique : privilégier insulinothérapie, traitement oral envisageableSurveillance : HbA1c trimestrielle-> Diététique : privilégier glucides de faible index glycémiqueSurveillance : Microalbuminurie annuelle, Créatininémie annuelle, Fond d'oeil annuel-> Insulinosécrétagogues :- glimépiride : 1 à 6 mg/j en 1 prise- répaglinide : 2 mg x 3/j- natéglinide -> Insulinothérapie : - analogues rapides : avant chaque repas, 0,1 U/kg/repas- insulines d'action intermédiaire : 1-3 injections/j, 0,19 U/kg/j, prémélanges possibles- analogue retard : 1 injection/jQUESTION 5Quelle doit être la prise en charge de l'atteinte hépatobiliaire au cours de la mucoviscidose ?Les lésions hépatobiliaires résultent à la fois de l'obstruction ductulaire et de la cytotoxicité des acides biliaires hydrophobes. Il n'existe pas de génotype spécifique de l'atteinte hépatique. LES LÉSIONS HÉPATO-BILIAIRES AU COURS DE LA MUCOVISCIDOSEQuinze à 20 % de patients développent des lésions hépatobiliaires cliniquement significatives. Leur fréquence augmente nettement à l'adolescence et diminue au-delà de l'âge 20 ans. L'allongement de la survie des patients explique leur augmentation.I. Les lésions hépatiquesLa cirrhose biliaire focale est la lésion la plus caractéristique. Sa fréquence augmente dès la naissance et peut atteindre 70 % chez l'adulte.Une cirrhose macronodulaire multilobulaire se développe chez une minorité de patients. Sa fréquence à l'adolescence varie de 5 à 20 %. Elle est à l'origine de plus de 15 % des décès.La stéatose est observée chez 20 à 60 % des malades.II. Les lésions biliaires- L'ictère cholestatique néonatal (fréquence < 2 %) s'associe dans plus de la moitié des cas à un iléus méconial et disparaît habituellement sans séquelle.- La microvésicule observée dans 30 % des cas ne s'accompagne généralement pas de cholécystite.- La lithiase biliaire est rarement symptomatique.- La cholangite sclérosante est très rare.COMMENT FAIRE LE DIAGNOSTIC ?- En l'absence de critère prédictif d'une évolution vers la cirrhose biliaire multilobulaire l'examen clinique doit rechercher systématiquement une hépatomégalie et des signes d'hypertension portale (HTP).- Une fois par an seront dosées transaminases et gamma GT, et une échographie sera réalisée à la recherche d'anomalies parenchymateuses (foie hyperéchogène de la stéatose, foie hétérogène nodulaire de la cirrhose multinodulaire), d'anomalies de la vésicule biliaire et d'une HTP (Doppler).Une fibroscopie gastrique est recommandée en cas de suspicion de cirrhose et est alors renouvelée tous les 2 ans.La tomodensitométrie peut être proposée lorsque l'échographie n'est pas concluante.La ponction biopsie hépatique est difficilement recommandable dans le cadre d'un dépistage (source d'erreur par ponction en zone saine).La cholangio-RM, capable de détecter des lésions hépatobiliaires précoces, devrait voir ses indications s'élargir.TRAITEMENTI. Traitement de la maladie hépatobiliaireL'acide ursodésoxycholique (AUDC) doit être recommandé pour toute présomption d'atteinte hépatique chronique. La posologie efficace est de 20 mg/kg/jour, en traitement continu.La prescription de tout médicament potentiellement hépatotoxique nécessite un contrôle rapproché des transaminases.II. Traitement des complications de la cirrhoseIl n'existe pas chez l'enfant de traitement médicamenteux ou endoscopique reconnu en prévention primaire de l'hémorragie par HTP. L'utilisation des AINS et de l'aspirine est proscrite. Les bêtabloquants sont contre-indiqués en raison de leur effet bronchique et les dérivés nitrés n'ont pas été évalués chez l'enfant.La sclérose endoscopique des varices oesophagiennes est utilisée en première intention en cas de saignement actif. Le choix entre sclérose et ligature dépend essentiellement de l'expérience de l'endoscopiste.Une anastomose porto-cave chirurgicale peut être proposée en cas d'échec du traitement endoscopique. L'anastomose spléno-rénale sélective parait être la solution idéale en limitant le risque d'encéphalopathie sans compromettre une éventuelle transplantation hépatique. La dérivation porto-systémique transhépatique (TIPS) est une technique récente dont l'indication pédiatrique est amenée à s'élargir.RECOMMANDATIONS GÉNÉRALESLe dépistage de l'atteinte hépatobiliaire doit être réalisé dès la naissance et son traitement par l'AUDC doit être mis en oeuvre précocement. L'échographie doit être systématique. L'HTP menace le pronostic vital et doit être maîtrisée à court terme par les techniques endoscopiques, à moyen terme par les shunts radiologiques (TIPS) ou chirurgicaux, à long terme par la transplantation.
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